mercredi 18 juin 2014

Le jour où le petit Alexandre, qui n’aimait pas du tout écrire, est devenu poète…


Alexandre Phaneuf,  11 ans:  le poète à l'oeuvre


Au fur et à mesure que les enfants vieillissent, ils délaissent la lecture des albums illustrés. Pourtant, les albums sont bien plus que des «petites histoires avec des dessins». Les albums sont des livres puissants, parfois de véritables chefs-d’œuvre artistiques, qui abordent des sujets complexes. Et ce n’est pas parce qu’on lit des romans qu’on ne devrait plus lire des albums. Ce n’est pas parce qu’on est en cinquième année ou en secondaire 2 qu’il faut se priver de la beauté et de la richesse des albums. Comme l’a brillamment démontré Véronique Bélanger, enseignante à l’école de la Rose-des-vents, à Cantley, les albums peuvent être de fabuleux tremplins vers l’écriture.

Voici donc, pour tous ces incroyants (adultes et enfants) qui n’ouvrent plus d’albums depuis qu’ils ont « gradué » au roman, voici donc une histoire vraie, avec en son cœur un petit garçon en chair et en os, qui a ébloui ses camarades de classe et qui a fait pleurer son enseignante. Voici donc une histoire vraie qui montre la fabuleuse puissance des albums.

Notre héros s’appelle Alexandre Phaneuf. Il a 11 ans et jusqu’à tout récemment, il ne savait pas qu’il était poète. Alexandre est en 5e année à l’école de la Rose-des-Vents. Comme il a des difficultés d’apprentissage, Alexandre n’aimait pas du tout écrire. Pas du tout! Jusqu’au jour où …

Depuis la rentrée scolaire, Véronique Bélanger, enseignante de 5e année, cherchait une façon d’aider Alexandre à écrire. Après avoir mis des outils technologiques en place pour aider Alexandre à alléger sa tâche d’écriture, elle se triturait les méninges pour trouver un moyen d’amener son élève (et plusieurs autres aussi) à avoir du plaisir à écrire. Après avoir participé à un atelier sur l’album que j’ai donné à l’équipe enseignante de son école, Mme Véronique décide de tester une nouvelle approche en se servant d’un album pour intégrer art et écriture.

Pour cette activité, elle choisit l’album coréen Le parapluie vert. Elle ne raconte pas l’histoire à ses élèves, mais colle plutôt des « post-its » dans le livre, pour cacher le texte. Chaque semaine, elle dévoile aux élèves une illustration de l’album. Chaque semaine, les élèves doivent écrire 45 à 50 mots sur l’image dévoilée. Pour marier art et écriture, ils doivent illustrer leur texte selon la technique monochrome, à la manière de Picasso. Durant six semaines, les élèves écrivent donc leur propre histoire, en s’inspirant des illustrations d’un album dont ils n’ont pas lu le texte.

Alexandre et son enseignante, Véronique Bélanger

À la grande surprise de Mme Véronique, Alexandre accroche. Il se met à écrire, avec intérêt et motivation! À la grande surprise d’Alexandre, il aime ça!

« Ce sont les images qui ont amené Alexandre à l’écriture. Avec ce projet, il a découvert que l’écriture est une forme d’art, que ce n’est pas juste une corvée. Malgré ses difficultés, il a compris que l’écriture, ce n’est pas juste l’orthographe, c’est aussi des idées. Et ce n’est pas parce que tu fais des fautes que tu n’as pas de talent », explique l’enseignante.

Au fur et à mesure que les créations des élèves progressent, l’enseignante lit à voix haute les histoires créées. Très vite, la classe est fascinée par l’histoire d’Alexandre. Les enfants la réclament chaque semaine. « Un élève m’a même dit : l’histoire d’Alexandre est meilleure que celle du vrai livre! Les enfants ne voyaient plus Alexandre de la même manière », raconte Véronique Bélanger.

L’enseignante invite la directrice de l’école dans sa classe pour qu’elle entende l’histoire d’Alexandre. La directrice est émue. Alexandre est bouche bée. Quant à Mme Véronique, elle ne peut s’empêcher de pleurer en relisant pour une énième fois l’histoire de son élève.

Et pourquoi avez-vous pleuré Mme l’enseignante? « Mon émotion, c’était devant la beauté du texte d’Alexandre, mais aussi devant sa réussite. Je dis merci à la vie d’avoir envoyé cet enfant dans ma classe, car ça m’a permis de relever des défis. On peut faire des belles choses avec des enfants qui ont des difficultés d’apprentissage », affirme Véronique Bélanger.

En mai, l’école de la Rose-des-Vents a choisi Alexandre comme « élève coup de cœur » pour la Commission scolaire des Draveurs. Chaque semaine, Alexandre emprunte deux albums à la bibliothèque. Désormais, Alexandre aime créer des textes, inventer des histoires. Le petit garçon qui n’aimait pas du tout écrire est devenu poète…

Voici l’histoire d’Alexandre Phaneuf, 11 ans, inspirée des illustrations de l’album Le parapluie vert