mardi 3 décembre 2013

Quand on se compare, on se console...





Ces jours-ci, bien des écrivains ronchonnent (à commencer par moi…)  Au récent Salon du livre de Montréal, j’ai entendu les doléances habituelles.  Inutile de les répéter, tout le monde les connait. Trop de ceci, pas assez de cela…
Au-dessus du concert de récriminations  (auquel je contribue) j’ai entendu une voix positive. Joyeuse. Une autre tonalité dans le concert des jérémiades.  
Une voix qui m’a ramené sur le sentier de la gratitude.  
C’est la voix de l'écrivain François Gravel.

Laissez-moi vous expliquer la théorie de François, pour qui le monde du livre ressemble à une pyramide. 

À la base de cette pyramide, vous trouvez tous ceux qui rêvent d'écrire. Qui disent vouloir écrire. Qui écriront un jour, quand ils auront plus de temps, que le petit dernier entrera en maternelle, qu’ils auront rénové leur maison ou quand ils prendront leur retraite… Ils sont légion ces rêveurs. 

Maintenant, montez un peu dans la pyramide et vous trouvez  ceux qui commencent à écrire. Mais qui ne finissent jamais. Ceux qui entament moult manuscrits puis les abandonnent en cours de route, laissant leurs histoires à demi-achevées s’empoussiérer dans leurs tiroirs ou qui prendre de la place sur leur disque dur…   

Continuez à grimper dans la pyramide, qui se fait de plus en plus étroite. À cette hauteur, vous trouvez ceux qui réussissent à terminer un manuscrit, mais ne réussissent jamais à  le publier.  Ces milliers et milliers « d’écrivains en devenir » qui ont eu la discipline et la détermination d’aller jusqu’au bout, mais qui se butent aux refus des maisons d’édition. Pour ceux-là, j’ai une profonde empathie.

Vous êtes presque arrivés au sommet de la pyramide,  là où se trouvent 95 % des écrivains. Ceux qui ont publié.  Parfois beaucoup, parfois peu. Ceux qui ont publié et ont des lecteurs. Parfois beaucoup, parfois peu.  Ceux qui gagnent quelques prix, ont parfois un best-seller, sont connus de certains libraires et ont le plaisir (le soulagement) de voir des lecteurs (parfois beaucoup, parfois peu) se présenter à leur table dans les salons du livre…

Au sommet de la pyramide,  à l’apex tant convoité,  se trouvent les auteurs vedettes. Ceux qui vivent de leur plume.  Ceux qui ont des admirateurs.  Ceux qui ont des files d’attentes de lecteurs devant leur table dans les salons du livre.   La pointe de la pyramide est pointue… il y a peu de place dans ces hauteurs.  Les écrivains vedettes sont donc peu nombreux.

J’ai médité sur cette pyramide imaginée par François.  J’ai ressassé et ruminé l’image.  Puis je me suis dit : arrête de ronchonner ma vieille, t’es pas au sommet de la pyramide, mais t’es pas à la base non plus.  Et comme dit si bien l'auteur des Klonk,  mieux vaut essayer (avec l'accent sur le verbe essayer) de ne pas se comparer...

Et puis, il fait meilleur d'arpenter les sentiers de la gratitude que de traîner dans les allées des lamentations.
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