mercredi 11 mai 2011

"J’aime la way que ta skirt hang"


Hier midi à Miramichi, j’ai fais une découverte culinaire pas piquée des vers: les doigts à l’ail avec sauce Donair (sucrée). J’ai dégusté ce met goûteux et légèrement graisseux en compagnie des élèves du club Hackmatack de l’école Carrefour Beausoleil. Un blondinet avec un sourire timide et un regard de vieille âme m'a posé une belle question à laquelle je n’ai pas su pas quoi répondre: « De toutes les étapes pour écrire un livre, quel est ton moment préféré d’écriture? » On ne me l’avait jamais posée celle-là. À méditer.

De Bathurst à Miramichi, en passant par Rogersville et St-Antoine, dans le cadre de cette tournée Hackmatack, j’entends des accents aussi différents que charmants. J’ouvre grand les oreilles et je me fais des nœuds dans la langue pour ne pas commenter leurs accents. Ça me fait tellement fait suer quand les Français de France se répandent en exclamations sur mon accent que je ne vais pas servir le même traitement aux Acadiens.

N’empêche, le soir, dans le secret de ma chambre d’hôtel, je note les expressions les plus imagées.

Comme cette patiente qui dit à son médecin : « Y’a du sang dans mon fumier. »
Traduction : « du sang dans mes selles ».

Ou cet exemple du chiac de Moncton: «J’aime la way que ta skirt hang».

lundi 9 mai 2011

Écrire des livres caillou-dans-le-soulier…


Photo: Expecting words

En transit dans l’aéroport, en route vers un joyeux festival, je m’offre le luxe de lire les journaux en prenant mon temps. Et j’y trouve amplement de quoi méditer. Entre autres, cet excellent article d’Odile Tremblay (une des plumes les plus élégantes du Devoir) sur la présence de l’Afrique au Festival de Cannes. En moins d’une demi-page, elle laisse tomber plusieurs perles, qui me font sortir mon stylo pour mieux les noter. La critique nous explique que pour les Africains, remporter un prix à Cannes a un impact énorme. Et Odile Tremblay d’écrire : « La fierté est aussi importante que le pain. »

Toujours au sujet du Festival de Cannes, le Globe and Mail signale qu’un des films à surveiller sera le tout récent Lars Von Trier. Et le journaliste d’offrir cette citation du cinéaste danois : « Un film devrait être comme un caillou dans votre soulier. » À nouveau, je ressors mon stylo pour noter cet aphorisme. Et de m’exclamer mentalement: « Oui, oui, moi itou! Moi itou! » C’est des livres comme ça que je veux écrire. Des histoires qui dérangent. Qui secouent. Des livres caillou-dans-le-soulier.

Des livres qui parlent des millions d’enfants que la malaria tue à chaque année, des petites Afghanes qui n’ouvriront jamais un livre, du gamin qui vit et travaille dans un dépotoir de Calcutta… Ces histoires de vie m’attirent et j’ai envie de les transformer en romans que les jeunes auraient envie de lire.

Ouais.
Ça tombe mal
Très mal.
Parce que ces histoires intéressent peu de gens. Ce genre d'histoire est rarement l'étoffe de "best-seller". Comme le disait au Devoir la journaliste Azeb Wolde-Giorghis, qui a couvert le mariage royal: «On était 8000 journalistes pour ces noces-là; mais pour l'Afrique, il n'y a jamais personne.»

Devant le manque d’intérêt du « grand public » pour ce qui me passionne, je me rends à l’évidence : je suis née à la mauvaise époque.
Mais… un instant.
Y a-t-il déjà eu une époque où les romans « caillou-dans-le-soulier » étaient populaires?